cut or die
September 5, 2003Neuf heures trente, surmontant ma peur et mon dégoût j’entre dans le petit
salon de coiffure. Dix minutes s’écoulent pendant lesquelles j’écoute à moitié
ce que racontent le coiffeur et son client actuel. Souriant de temps en temps
pour faire honneur au samedi matin. Les yeux fixés sur la tondeuse avalant les
pauvres millimètres de cheveux survivants entre les lames et la peau du type,
je peux à peine me détourner du carnage. Il me parle, c’est mon tour. J’essaie
de me convaincre que j’ai besoin de cheveux plus courts, et qu’ils ont pour
l’instant un air déplorable, ce qui n’arrange rien au mien.
Il a des idées bien ce coiffeur finalement : il est content de voir des
cheveux longs me dit-il. Mais la mode est aux cheveux courts depuis quelques
années, il est content. Enfin il a l’air… Je suppose que je lui rappelle sa
jeunesse, avant qu’il se décollore et qu’on ne lui coupe lui aussi les
cheveux. Il a l’air con avec sa moustache blonde, et sa tignasse platine, mais
bon c’est la mode il a bien fallu s’y faire. Il me raconte un peu sa vie,
comme tous les coiffeurs. Sourions, ne pas partir en courant. De toute façon
il est trop tard : j’aurais l’air de quoi dans les rues, les cheveux mouillés.
Et puis merde, il a un peu raison. Y’en a marre des cheveux courts, rasés, des
crânes ronds et blancs qu’on croise dans la rue. Je vais juste en faire
enlever un peu. De quoi laisser repousser convenablement… On verra plus tard
le retour du cheveu court.
“cause I can’t stooop loving you…”, me chante-t-il. Moi aussi, je t’aime
bien mon grand. Mais tu devrais savoir qu’en continuant à me chanter du Phil
Collins, tes chances de survie tendent vers zéro.
Les coiffeurs sont des gens étranges.