pierre blanche

May 12, 2004

To: globe_l at samizdat dot net
Subject: [globe_l] Les premières conséquences de la LEN ?

Le très décrié projet de loi sur l’économie numérique — la fameuse LEN — qui vise à établir un contrôle de l’internet français ainsi que la notion de responsabilité des fournisseurs d’accès et des hébergeurs quant au trafic sur les réseaux et aux contenus proposés, devrait être définitivement voté par le Sénat demain, jeudi 13 mai 2004, date à marquer d’une pierre blanche.

Avant même son entrée en vigueur, des effets se font déjà sentir : en parallèle de la campagne médiatique et judiciaire massive que viennent d’enclencher les industries culturelles françaises, sur le modèle de la RIAA aux Etats-Unis, à l’encontre des utilisateurs de logiciels de peer-to-peer (alors même que plusieurs études contradictoires ne parviennent pas à déterminer leur rôle exact dans l’effondrement des ventes de disques), campagne qui traite de la piraterie au sens large et de la notion de propriété et de droits d’auteur autour d’une oeuvre artistique, il semble que le second volet principal de la LEN, qui concerne la responsabilité des hébergeurs quant aux contenus proposés sur leurs serveurs, fasse ses premiers dégâts : ainsi, les trois sites du comité Bellaciao ont été fermés sans sommation et sans explication par leur hébergeur, ce matin-même. Le plus gros site français en terme de volume de contributions, Indymedia Paris, a connu plusieurs jours de problèmes techniques avant de se remettre à fonctionner normalement… sauf que l’on s’aperçoit rapidement que la fonction d’Open Publishing anonyme — qui faisait la grande force mais aussi la faiblesse du site — a été désactivée, et qu’en l’absence d’explication claire l’internaute lambda ne peut plus poster quoique ce soit. Quant à un autre site de référence, Hacktivist News Services, qui rassemble également des contributions d’internautes, il est inaccessible car annoncé en chantier depuis plusieurs jours. On peut aussi signaler le pionnier Dissident Media qui a virtuellement fermé en décembre…

Anticipation de futurs problèmes juridiques par les uns et les autres ? Toujours est-il que les canaux de diffusion de la parole alternative militante ou tout simplement citoyenne se sont drastiquement réduits en l’espace d’une semaine. Le principe d’Open Publishing libre semble même être en train de passer à la trappe.

Espérons que cette dégradation brutale n’est qu’un état transitoire, nécessaire le temps d’adapter de nouveaux modes de fonctionnement à l’entrée en vigueur de la loi, et ne constitue pas les prémisses de la disparition de l’internet militant à l’intérieur des frontières de l’hexagone : m’étant habitué aux superbes vitrines médiatiques et politiques que sont des sites web indépendants et intelligemment conçus, il serait plutôt frustrant de devoir revenir aux désuètes listes de diffusion… ou d’héberger ses sites à l’autre bout du monde.

Auteur : Zedrx
Sources :
indymedia paris
bellaciao.org
hns info
dissident-media.org

C’est juste un autre point de vue, mais autant le faire partager.